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Trouver d¡¯urgence des moyens de d¨¦velopper l¡¯agriculture

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Trouver d¡¯urgence des moyens de d¨¦velopper l¡¯agriculture

Une s¨¦rie de fusions entre les principaux producteurs mondiaux d¡¯OGM inqui¨¨te les autorit¨¦s de r¨¦gulation
Afrique Renouveau: 
GMO maize... could soon be popular in African countries.  Photo: Saravanakumar Muthusamy
Photo: Saravanakumar Muthusamy
Le ma?s OGM pourrait bient?t ¨ºtre tr¨¨s r¨¦pandu en Afrique. Photo: Saravanakumar Muthusamy

Le professeur Richard Mulwa s¡¯y conna?t en organismes g¨¦n¨¦tiquement modifi¨¦es - ou OGM. Dans son laboratoire de l¡¯Universit¨¦ d¡¯Egerton au Kenya, il cherche ¨¤ r¨¦duire le cyanure qui appara?t naturellement dans le manioc poussant dans les r¨¦gions de moyenne montagne du Kenya.?

"Si nous pouvons isoler le m¨¦canisme g¨¦n¨¦tique de la plante qui produit le poison, nous pouvons cr¨¦er un manioc comestible en haute altitude?", d¨¦clare-t-il ¨¤ Afrique Renouveau.?

?"Ceci pourrait cr¨¦er toutes sortes de possibilit¨¦s pour les agriculteurs de ces r¨¦gions¡±, explique le professeur dans le calme de son laboratoire qui contraste avec le bruit assourdissant des minibus, les matatus, ¨¤ l¡¯ext¨¦rieur du campus de l¡¯universit¨¦.?

Au Kenya, le ma?s est l¡¯aliment de base, mais les s¨¨cheresses fr¨¦quentes dues au changement climatique affectent les r¨¦coltes. Produire davantage de manioc, autre aliment de base, pourrait s¡¯av¨¦rer indispensable. ??Le manioc r¨¦siste tr¨¨s bien ¨¤ la s¨¨cheresse??, d¨¦clare le Professeur Mulwa.? ? ?

Si nous pouvons isoler le m¨¦canisme g¨¦n¨¦tique de la plante qui produit le poison, nous pouvons cr¨¦er un manioc comestible en haute altitude.

Les OGM furent commercialis¨¦s en 1996, par le fabricant am¨¦ricain Monsanto, qui avait r¨¦ussi ¨¤ rendre des graines de ma?s r¨¦sistantes aux parasites et des graines de soja r¨¦sistantes ¨¤ un herbicide appel¨¦ glyphosate qui n'affectait pas le soja. ?En une d¨¦cennie, les surfaces de culture d¡¯OGM furent multipli¨¦es par cent. Mais les consommateurs se sont inqui¨¦t¨¦s de l¡¯impact des manipulations g¨¦n¨¦tiques. Les agriculteurs des champs voisins virent leurs r¨¦coltes dispara?tre, le glyphosate ¨¦tant d¨¦plac¨¦ par le vent des champs trait¨¦s vers ceux qui ne l¡¯¨¦taient pas.? ????

Les recherches du Professeur Mulwa sur la modification g¨¦n¨¦tique du manioc furent entrav¨¦es, en 2012, par l¡¯interdiction des OGM par le gouvernement ¨¤ la suite des plaintes de consommateurs. ??Nous avons termin¨¦ notre recherche en laboratoire et voulons la tester sur le terrain. Notre travail est au point mort??, se plaint le Professeur Mulwa. D¨¦but 2017, l¡¯Autorit¨¦ nationale de bios¨¦curit¨¦ au Kenya a annonc¨¦ des tests de plantes OGM, d¨¦fiant le minist¨¨re de la sant¨¦. Le groupe d¡¯enqu¨ºte sur la s¨¦curit¨¦ des OGM cr¨¦¨¦ par le gouvernement a recommand¨¦ de lever l'interdiction au cas par cas.??

La r¨¦volution verte

Le groupe d¡¯experts intergouvernemental sur l¡¯¨¦volution du climat (IPCC) note que les effets du changement climatique dans les ann¨¦es ¨¤ venir pourraient ¨ºtre aggrav¨¦s par la croissance exponentielle de la population. Un million de personnes vivent en Afrique et ce nombre devrait doubler d¡¯ici ¨¤ 2050, selon les donn¨¦es de l¡¯ONU. D¡¯ici ¨¤ 2040, la population du Kenya devrait ¨¤ elle seule passer de 45 ¨¤ 80 millions de personnes. Dans ces conditions, la production agricole doit augmenter.

Pour parer ¨¤ une chute anticip¨¦e de la productivit¨¦ agricole, les dirigeants africains se sont engag¨¦s, en 2003 ¨C ¨¤ travers le Programme d¨¦taill¨¦ de d¨¦veloppement de l¡¯agriculture en Afrique (PDDAA)- ¨¤ investir 10% de leurs budgets nationaux dans le secteur agricole. Ils ont convenu de consacrer plus d¡¯argent au d¨¦veloppement rural, ¨¤ la distribution d¡¯¨¦lectricit¨¦ dans les campagnes, ¨¤ une meilleure irrigation, aux entrep?ts et infrastructures de qualit¨¦ qui permettent aux agriculteurs de se rendre sur les march¨¦s.?

Mais plus de dix ans apr¨¨s l¡¯adoption du PDDAA, seuls neuf des 54 pays ont rempli leurs engagements. Le manque d¡¯investissements dans l¡¯agriculture laisse le champ libre ¨¤ des entreprises telles que Monsanto ou Bayer, estime Stephen Greenberg, un chercheur au Centre africain pour la biodiversit¨¦ bas¨¦ ¨¤ Johannesburg.

Lors du Sommet ¨¦conomique mondial de 2016 ¨¤ Davos, en Suisse, le milliardaire philanthrope Bill Gates a lanc¨¦ l'id¨¦e que les OGM pouvaient permettre une ??r¨¦volution agricole?? en Afrique.?

N¨¦anmoins, le d¨¦veloppement d¡¯OGM est une entreprise co?teuse et hautement sp¨¦cialis¨¦e. Quelques multinationales (Monsanto, Bayer, Syngenta, Dow Chemical, DuPont et BASF) en ont actuellement le monopole et commencent ¨¤ s¡¯implanter dans les pays en d¨¦veloppement, dont l¡¯Afrique.? ?

La premi¨¨re initiative pour introduire les OGM en Afrique eut lieu en 2000. Un premier projet men¨¦ par la biologiste kenyane form¨¦e par Monsanto, Florence Wambugu, fut lanc¨¦ par la Banque mondiale, le gouvernement am¨¦ricain et Monsanto. Le but ¨¦tait de d¨¦velopper des patates douces r¨¦sistantes aux virus. Apr¨¨s trois ans d¡¯essais, les patates g¨¦n¨¦tiquement modifi¨¦es s¡¯av¨¦r¨¨rent tout aussi vuln¨¦rables que les autres. ???

Sans compter qu'un programme de cultures classiquesen Ouganda r¨¦ussit ¨¤ cr¨¦er des patates douces r¨¦sistant aux virus beaucoup plus vite et pour beaucoup moins cher. D¨¦but 2004, le journal britannique New Scientist qualifia l¡¯affaire ??d¡¯¨¦chec de Monsanto??.

Apr¨¨s plusieurs ann¨¦es d¡¯exp¨¦rimentations, un nouveau grand projet d¡¯OGM pour l¡¯Afrique fut annonc¨¦ en 2008, dans la capitale ougandaise Kampala : le WEMA (Ma?s ¨¦conome en eau pour l¡¯Afrique), un ma?s g¨¦n¨¦tiquement modifi¨¦ qui r¨¦siste aux s¨¦cheresses et aux insectes qui rassemble associant une ¨¦quipe de scientifiques internationaux et des instituts de recherche au Kenya, au Mozambique, en Afrique du sud, en Tanzanie et en Ouganda. .??

Monsanto fournit le mat¨¦riel g¨¦n¨¦tique et la Fondation africaine pour les technologies agricoles (AATF), une ONG bas¨¦e ¨¤ Nairobi et financ¨¦e par la Fondation Rockfeller, USAID, Syngenta et PepsiCo, coordonna le projet. La Fondation Bill & Melinda Gates investit 85 millions de dollars.

Le Kenya perd jusqu¡¯¨¤ 90 millions de dollars apr¨¨s les r¨¦coltes chaque ann¨¦e, estime le directeur de projet pour WEMA, Sylvester Oikeh. ??Commercialiser largement le ma?s WEMA r¨¦pond aux demandes des agriculteurs qui veulent des solutions innovantes??.

Actuellement, les OGM ne sont utilis¨¦s que dans quatre pays africains?: le Burkina Faso, l¡¯?gypte, l¡¯Afrique du Sud et le Soudan.

En 2015, ACBio a publi¨¦ un rapport critique ¨¤ l¡¯encontre de WEMA, qui conclut que le ma?s fourni par Monsanto pour ce projet n¡¯avait donn¨¦ aucun r¨¦sultat probant en Am¨¦rique du Nord, o¨´ il est vendu sous le nom de DroughtGard. ??

Adopter des vari¨¦t¨¦s de ma?s hybrides est une bonne id¨¦e, mais les agriculteurs doivent en prendre l'initiative, recommandent les experts. ???Nombre de r¨¦ponses sont ¨¤ trouver dans le savoir-faire des agriculteurs, qui peuvent entretenir des sols sains qui conservent davantage l¡¯eau m¨ºme en cas de s¨¦cheresse??, souligne Lim Li Ching, chercheur pour Third World Network, un r¨¦seau international d¡¯organisations qui ¨¦value la viabilit¨¦ ¨¦cologique des politiques agricoles.?

La suppos¨¦e capacit¨¦ de r¨¦sistance aux insectes du WEMA n'ayant pas fait ses preuves, le ma?s fut discr¨¨tement retir¨¦ du march¨¦. ?

Les agriculteurs sud-africains ne cultivent presque que ?ma?s OGM depuis plus de vingt ans, explique M. Greenberg. ???Les agriculteurs ont des probl¨¨mes car les insectes sont maintenant immunis¨¦s. Mais il existe un tel monopole sur le march¨¦ qu¡¯ils n¡¯ont pas d¡¯autre solution que d¡¯attendre que Monsanto d¨¦veloppe une nouvelle vari¨¦t¨¦ d¡¯OGM.???

Acteurs de r¨¦f¨¦rence

Les premiers ma?s WEMA furent r¨¦colt¨¦s au Mozambique en ao?t 2017. Avec la fusion des grandes entreprises biotechnologiques, les pressions pour que des OGM soient distribu¨¦s sur les grands march¨¦s africains peu desservis vont ¨ºtre d¡¯autant plus fortes, craint ACBio. Monsanto et ?Bayer discutent actuellement d'une fusion ¨¤ 63,5 milliards de dollars.?

Prenant exemple sur les six plus grandes compagnies biotechnologiques, le conglom¨¦rat chinois ChemChina a annonc¨¦ en 2016 l¡¯acquisition de l¡¯entreprise suisse Syngenta. De m¨ºme, DuPont et Dow Chemical envisagent de fusionner. Cette vague sans pr¨¦c¨¦dent de fusions est surveill¨¦e de pr¨¨s par les autorit¨¦s de r¨¦gulation europ¨¦ennes et am¨¦ricaines. ??

En f¨¦vrier 2017, ACBio a publi¨¦ une ¨¦tude sur la fusion Monsanto-Bayer o¨´ sont r¨¦v¨¦l¨¦es les cons¨¦quences pour les agriculteurs africains. ??Si les petits propri¨¦taires terriens passent tous au ma?s OGM, l¡¯agriculture et la biodiversit¨¦ africaines en souffriront. A terme, cela r¨¦duira aussi leurs choix car le march¨¦ est domin¨¦ par quelques acteurs de r¨¦f¨¦rence qui p¨¨sent lourd??, insiste M. Greenberg. ?

?¡°Les petits producteurs sont tr¨¨s affect¨¦s lorsque le prix des graines augmentent, ce qui ne r¨¦sout en rienla pauvret¨¦ rurale. Mais Monsanto peut gagner beaucoup d¡¯argent en vendant ce genre de technologies de pointe.??

Des peurs sans fondements

Si les peurs des consommateurs vis-¨¤-vis des OGM sont peut-¨ºtre infond¨¦es, estime le Professeur Mulwa, on peut n¨¦anmoins critiquer l¡¯approche des grands fournisseurs.??

L¡¯emploi des OGM devrait se faire selon les pratiques d¡¯agriculture locales, conseille-t-il. ??Je suis pour les OGM. D¡¯un point de vue scientifique, les agriculteurs ont beaucoup ¨¤ y gagner. Mais en tant que scientifique, je suis des normes ¨¦thiques, non des int¨¦r¨ºts ¨¦conomiques. Je vais sur le terrain m'entretenir avec les agriculteurs. Je veux r¨¦gler leurs probl¨¨mes en employant la biotechnologie ?, d¨¦clare le Professeur Mulwa.

L¡¯utilisation g¨¦n¨¦ralis¨¦e des OGM en Afrique d¨¦pendra probablement de la fa?on dont les entreprises biotechnologiques?chercheront ou non ¨¤ faire des profits tout en pr¨¦servant la s¨¦curit¨¦ alimentaire.

¡° Le d¨¦veloppement des OGM ne devrait pas ¨ºtre laiss¨¦ ¨¤ des entreprises trop puissantes. Comme tout, les OGM peuvent ¨ºtre utilis¨¦es ¨¤ bon ou mauvais escient ?, conclut le Professeur Mulwa.

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