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Commerce intra-africain et infrastructures

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Commerce intra-africain et infrastructures

Les commer?ants ouest-africains veulent plus d¡¯investissements dans les transports
Afrique Renouveau: 
Tomato trader, Margaret Lartey, in a market in Ghana. Photo: Efam Awo Dovi
Photo: Efam Awo Dovi
Margaret Lartey, vendeuse de tomates, Ghana.

Ken Ukaoha en conna?t long sur les infrastructures et le commerce entre pays africains : il est le fondateur et PDG de Kenaux International Concept, une entreprise de fabrication de chaussures et de v¨ºtements situ¨¦e ¨¤ Aba, dans le sud-est du Nig¨¦ria, dont les produits sont vendus dans l pays comme le Ghana, l¡¯Afrique du Sud, la Centrafrique.? ? ??

Les probl¨¨mes d¡¯infrastructures

Pour les entrepreneurs africains, l¡¯¨¦tat d¨¦plorable des infrastructures est un vrai fl¨¦au, explique M. Ukaoha, qui est le pr¨¦sident de l¡¯association des commer?ants nig¨¦rians. En d¨¦pit des accords commerciaux sign¨¦s depuis des d¨¦cennies au sein de la Communaut¨¦ des ?tats d¡¯Afrique de l¡¯Ouest (CEDEAO), l¡¯acc¨¨s aux march¨¦s continue d¡¯¨ºtre ralenti par la mauvaise qualit¨¦ des transports.

¡°Nous n¡¯avons pas de lignes de train pour d¨¦placer les marchandises d¡¯un pays ¨¤ l¡¯autre. Les transports par bateau sont aussi un probl¨¨me ¨C les liaisons maritimes n¡¯existent pas¡±, indique M. Ukaoha. Il souligne ainsi, la n¨¦cessit¨¦ de cr¨¦er des voies de transport maritimes. ? ? ?

M. Ukaoha, expert en droit du commerce international, explique la difficult¨¦ de transporter des biens d¡¯un pays ¨¤ l¡¯autre de la CEDEAO. ¡°Lorsque j¡¯importe des mati¨¨res premi¨¨res comme le cuir d¡¯Hambourg en Allemagne jusqu¡¯¨¤ Lagos au Nig¨¦ria, je paie 850 euros pour un conteneurs d¡¯un peu plus d¡¯un m¨¨tre. Mais le m¨ºme conteneurs pour transporter nos produits de Lagos au Port de Tema au Ghana co?te 1 350 euros.¡± ? ?

Le transport routier pr¨¦sente aussi des difficult¨¦s. ¡°Les routes ne sont pas bonnes, et il y a beaucoup de contretemps¡±, notamment les stationnements de police et des douanes, o¨´ la corruption est monnaie courante. ? ? ?

M¨ºme au sein des pays, l¡¯¨¦tat des infrastructures est si mauvais que les entrepreneurs construisent eux-m¨ºmes des routes menant ¨¤ leurs usines. Parfois, ils creusent des puits et ach¨¨tent leurs propres g¨¦n¨¦rateurs pour l¡¯¨¦lectricit¨¦. ¡°Tout ceci nous emp¨ºche d¡¯¨ºtre comp¨¦titifs¡±, reconna?t M. Ukaoha.

Parlant r¨¦cemment de l¡¯Accord de libre ¨¦change continental africain (AfCFTA), le ministre des finances du S¨¦n¨¦gal, Amadou Ba, affirmait que le nouveau trait¨¦ allait apporter des b¨¦n¨¦fices consid¨¦rables.? ?

¡°Nos pays sont engag¨¦s individuellement et collectivement¡±, a d¨¦clar¨¦ M. Ba, tout en y apportant un b¨¦mol, jugeant que les dirigeants africains doivent donner la priorit¨¦ aux investissements dans les infrastructures r¨¦gionales pour acc¨¦l¨¦rer l¡¯int¨¦gration et faciliter le commerce.? ?

Au Ghana, Margaret Lartey, dont l¡¯entreprise bas¨¦e ¨¤ Accra distribue des tomates, utilise le transport routier entre diff¨¦rents pays. Elle ach¨¨te des tomates dans plusieurs r¨¦gions du Ghana et de la C?te d¡¯Ivoire pour les revendre au Burkina Faso ; elle s¡¯indigne du nombre de stationnements de police sur les routes et des extorsions que pratiquent les policiers et douaniers aux fronti¨¨res.? ?

En outre, les co?ts du transport augmentent en raison de la fluctuation des prix du p¨¦trole. ? Avant, un camion de tomates pouvait aller du Ghana au Burkina Faso pour 738 dollars, maintenant il faut compter 843¡±, se plaint Melle Lartey.? ?

¡°La construction de r¨¦seaux routiers, ferroviaires et de t¨¦l¨¦communication permettra d¡¯ouvrir les march¨¦s et de stimuler le commerce,¡± souligne M. Ukaoha avec optimisme. ¡°Si nous pouvons d¨¦placer des marchandises facilement, ¨¤ un co?t raisonnable, du Ghana au Nig¨¦ria ou ailleurs en Afrique de l¡¯Ouest, nous aurons acc¨¨s ¨¤ un march¨¦ de plus de 350 millions de personnes.¡±

Faiblesses du syst¨¨me financier

Certains entrepreneurs craignent toutefois que l¡¯accord de libre-¨¦change nuise aux industries locales.

La lib¨¦ralisation du commerce, souligne M. Ukaoha, pourrait ¨ºtre ¡°mortelle¡± car une vague d¡¯importations, m¨ºme en provenance des autres pays africains, pourrait remplacer l¡¯industrie locale. ¡°Sans restrictions, l¡¯importation emp¨ºche les producteurs locaux de se d¨¦velopper.¡±

M. Ukaoha a donc des doutes sur l¡¯AfCFTA. ¡°Il y a la CEDEAO, l¡¯Union douani¨¨re d¡¯Afrique australe, les Accords de partenariat ¨¦conomique, et bien d¡¯autres accords pour favoriser l¡¯¨¦mergence d¡¯un march¨¦ commun que nous peinons ¨¤ mettre en place,¡± indique-t-il. ¡°Alors que nous estimions avoir fait quelques progr¨¨s, un nouvel accord commercial vient bouleverser tous les pr¨¦c¨¦dents¡­ Dans ces conditions, il est difficile de faire des progr¨¨s.¡±

Certains d¨¦noncent de graves faiblesses du syst¨¨me financier qui n¡¯aideraient pas les commer?ants et emp¨ºcheraient le d¨¦veloppement ¨¦conomique dont l¡¯Afrique a besoin.? ?

Gyekye Tanoh, membre de Third World Network-Africa, une organisation de la soci¨¦t¨¦ civile bas¨¦e ¨¤ Accra, qui d¨¦fend des politiques commerciales ¨¦quitables, constate une tendance n¨¦faste ¡°¨¤ l¡¯exploitation sp¨¦culative par les banques des diff¨¦rences entre les taux d¡¯int¨¦r¨ºt internationaux et les variations des taux d¡¯¨¦change.¡±

Retours sur investissement

Plut?t que d¡¯attirer des capitaux pour les secteurs productifs, les banques cherchent des retours sur investissement rapides en achetant des obligations d¡¯?tat, explique M. Tanoh.? ?

Melle Lartey qui n¡¯a pu obtenir un pr¨ºt malgr¨¦ ses efforts, partage ce constat. ¡°La plupart des banques demandent des garanties que les entrepreneurs n¡¯ont pas¡±, indique M. Ukaoha. ¡°M¨ºme si vous vous pliez ¨¤ leurs exigences, les taux d¡¯int¨¦r¨ºt sont trop ¨¦lev¨¦s¡­ Il faut beaucoup de travaux, de r¨¦sistance et de d¨¦termination.¡±

¡°La lib¨¦ralisation du secteur financier en Afrique de l¡¯Ouest attire le secteur priv¨¦, y compris les banques ¨¦trang¨¨res qui dominent le march¨¦ et alt¨¨rent le fonctionnement des banques nationales et les modalit¨¦s de pr¨ºt¡±, indique M. Tanoh.? ?

M¨ºme si les pr¨ºts ¨¤ court terme deviennent moins on¨¦reux, les petites entreprises et coop¨¦ratives les obtiennent rarement.

Certaines am¨¦liorations dans les transactions financi¨¨res profitent toutefois aux commer?ants. Les transferts, que proposent plusieurs banques, permettent ¨¤ un commer?ant au Ghana de se rendre au B¨¦nin sans risque de transporter des esp¨¨ces.

L¡¯AfCFTA est destin¨¦ ¨¤ r¨¦duire les obstacles au commerce, notamment les r¨¦glementations incoh¨¦rentes et les barri¨¨res non tarifaires, tels que les encombrements aux fronti¨¨res. ? ?

Lorsqu¡¯il entrera en vigueur, les ¨¦changes commerciaux entre pays reposeront sur des paiements par transferts, dont b¨¦n¨¦ficieront les commer?ants.

Reste ¨¤ convaincre les sceptiques des avantages d¡¯une zone de libre ¨¦change.? ? ?