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La bonne gouvernance : solution aux probl¨¨mes de l¡¯Afrique

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La bonne gouvernance : solution aux probl¨¨mes de l¡¯Afrique

¡ª Prof. Eddy Maloka
Zipporah Musau
Afrique Renouveau: 
Prof. Eddy Maloka, CEO of the African Peer Review Mechanism (APRM)
Photo: Africa Renewal
Prof. Eddy Maloka, Directeur g¨¦n¨¦ral du MAEP
Sous les auspices de l¡¯Union africaine (UA), les dirigeants africains ont cr¨¦¨¦ le M¨¦canisme Africain d¡¯Evaluation par les Pairs (MAEP) en 2003, afin de suivre les performances des ¨¦tats membres en mati¨¨re de gouvernance. Instrument d¡¯auto-¨¦valuation, le MAEP est destin¨¦ ¨¤ stimuler l¡¯adoption de politiques, normes et pratiques favorisant la stabilit¨¦ politique, la croissance ¨¦conomique, le d¨¦veloppement durable, ainsi qu¡¯¨¤ acc¨¦l¨¦rer l¡¯int¨¦gration r¨¦gionale. Zipporah Musau, d¡¯Afrique Renouveau, s¡¯est entretenu avec le Prof. Eddy Maloka, Directeur g¨¦n¨¦ral du Secr¨¦tariat du MAEP.

AR : Qu¡¯est-ce que le MAEP et comment fonctionne-t-il ?

Professeur Maloka : Nous sommes une agence sp¨¦cialis¨¦e, cr¨¦¨¦e par les chefs d¡¯?tats et de gouvernement africains pour proc¨¦der ¨¤ des ¨¦valuations respectives afin de renforcer la gouvernance. Nos bureaux sont ¨¤ Midrand en Afrique du Sud. Nous envoyons des ¨¦quipes aupr¨¨s des ?tats membres pour dresser des rapports sur la question de? gouvernance. Nous nous int¨¦ressons ¨¤ quatre secteurs : la d¨¦mocratie et la gouvernance politique, la gouvernance ¨¦conomique et la gestion, la gouvernance en entreprise et le d¨¦veloppement socio-¨¦conomique. L¡¯UA nous a r¨¦cemment demand¨¦s de surveiller ¨¦galement l¡¯¨¦tat de la gouvernance sur l¡¯ensemble du continent.

Combien de pays ont accept¨¦ d¡¯¨ºtre ¨¦valu¨¦s ?

Quand nous avons commenc¨¦, en 2003, il n¡¯y avait que six pays membres. Aujourd¡¯hui, nous en avons 37, le dernier adh¨¦rent ¨¦tant le Ghana. Pour le moment, nous avons ¨¦valu¨¦ 20 pays, dont le Tchad, le Ghana, le Kenya, le Mali, le Mozambique, le Nig¨¦ria, le S¨¦n¨¦gal et l¡¯Afrique du Sud. Le Kenya a ¨¦t¨¦ ¨¦valu¨¦ deux fois, et la seconde ¨¦valuation de l¡¯Ouganda vient d¡¯avoir lieu. Nous avons des bureaux dans plusieurs pays membres. Nous encourageons d¡¯autres pays ¨¤ cr¨¦er des bureaux du MAEP pour poursuivre le travail.

Vous n¡¯en avez vraiment pas besoin car il s¡¯agit d¡¯une libre participation. Quand les pays adh¨¨rent au MAEP, ils ont les m¨ºmes responsabilit¨¦s qu¡¯au niveau national.

Malgr¨¦ les r¨¦sultats obtenus, certains pays h¨¦sitent ¨¤ participer au MAEP. Pourquoi ?

L¡¯adh¨¦sion au MAEP est libre. Les pays y adh¨¨rent ¨¤ diff¨¦rents moments pour diverses raisons. La Namibie nous a r¨¦cemment rejoints, et des pays comme les Comores ont demand¨¦ ¨¤ le faire. Nous suivons le rythme de chacun, car devenir membre du MAEP implique une responsabilit¨¦. Vous devez ¨ºtre pr¨ºt ¨¤ laisser le MAEP ¨¦valuer la mani¨¨re dont vous op¨¦rer et ¨¤ faire des recommandations. Dans l¡¯id¨¦al, tous les membres de l¡¯UA devraient participer au MAEP.

Les pays estiment-ils que l¡¯¨¦valuation par les pairs est dans leur int¨¦r¨ºt ?

Nous indiquons aux participants que le MAEP n¡¯est pas l¨¤ pour chercher les fautes, mais qu¡¯il s¡¯agit d¡¯une plateforme de partage des meilleures pratiques. Par exemple, l¡¯Ouganda dispose d¡¯un des meilleurs syst¨¨mes de gestion et d¡¯int¨¦gration des r¨¦fugi¨¦s. Notre rapport en rendra donc compte, bien que nous y fassions aussi ¨¦tat des difficult¨¦s. ? la suite de notre ¨¦valuation, certains pays vont peut-¨ºtre se rendre ¨¤ l¡¯¨¦vidence qu¡¯ils doivent cr¨¦er de nouveaux minist¨¨res pour qu¡¯il y ait assez de femmes au Parlement, et lutter davantage contre la corruption. Ils prennent alors les mesures n¨¦cessaires ¨C institutionnelles et parfois l¨¦gislatives ¨C pour renforcer la gouvernance.

Les pays disposent-ils des moyens techniques et financiers n¨¦cessaires ¨¤ la mise en ?uvre de vos recommandations ?

Il appartient aux gouvernements de d¨¦cider de cette mise en ?uvre et nous faisons de notre mieux pour travailler coll¨¦gialement. Nous disposons d¡¯un groupe de travail sur les meilleures pratiques pour la planification nationale, co-pr¨¦sid¨¦ par l¡¯Afrique du Sud et l¡¯Ouganda. Son but est d¡¯encourager les pays ¨¤ int¨¦grer nos recommandations dans leurs processus de planification nationale et fiscale, afin qu¡¯un budget leur soit allou¨¦. Nous pr¨¦voyons aussi de mettre en place des missions de renforcement des capacit¨¦s.

Sans m¨¦canisme d¡¯application, le MAEP restera-t-il efficace ?

Vous n¡¯en avez pas vraiment besoin car il s¡¯agit d¡¯une participation libre. Quand les pays adh¨¨rent au MAEP, ils ont les m¨ºmes responsabilit¨¦s qu¡¯au niveau national. L¡¯actuel pr¨¦sident de l¡¯UA, le pr¨¦sident tchadien Idriss D¨¦by, nous a demand¨¦ de mettre en place un groupe de travail pour r¨¦fl¨¦chir ¨¤ la question que vous venez de formuler. Il souhaite que les ¨¦valuations aillent plus loin et que les chefs d¡¯?tats et de gouvernements r¨¦fl¨¦chissent ¨¤ la fa?on de les rendre plus efficaces.

Le MAEP est connu pour son syst¨¨me d¡¯alerte rapide. Pourriez-vous nous donner quelques exemples de situations dans lesquelles ce syst¨¨me a permis d¡¯¨¦viter une crise ?

Les rapports du MAEP soulignent les probl¨¨mes qui doivent ¨ºtre trait¨¦s rapidement. Mais, les pays ne r¨¦agissent pas toujours. J¡¯ai ¨¦t¨¦ au Mali r¨¦cemment et tout le monde disait que ce qui s¡¯y passait [les combats entre gouvernement et rebelles] avait ¨¦t¨¦ pr¨¦dit dans un rapport du MAEP. Cependant, le pays n¡¯avait pas fait assez pour appliquer les recommandations. Il y a d¡¯autres pays o¨´ le rapport du MAEP a mis en ¨¦vidence les cons¨¦quences du refus d¡¯appliquer certaines mesures. Notre efficacit¨¦ d¨¦pend de la prise en compte des recommandations faites ; nous ne pouvons que regretter les cons¨¦quences lorsqu¡¯elles sont ignor¨¦es.

Dans le cadre de la r¨¦forme de l¡¯UA, le MAEP est impliqu¨¦ dans la surveillance des progr¨¨s r¨¦alis¨¦s dans la mise en ?uvre de l¡¯Agenda 2063 pour l¡¯Afrique ainsi que des Objectifs de d¨¦veloppement durable (ODD). N¡¯est-ce pas trop ?

Nous avons commenc¨¦ ¨¤ y travailler et publierons le premier rapport sur l¡¯¨¦tat de la gouvernance [et de la Responsabilit¨¦ en Afrique] en janvier 2019 en marge du sommet de l¡¯UA. Quant aux ODD, cela ne rel¨¨ve pas de notre seule responsabilit¨¦. Une part de la planification strat¨¦gique est r¨¦alis¨¦e ¨¤ Addis-Abeba en Ethiopie [si¨¨ge de l¡¯UA]. Nous op¨¦rons en coordination avec les responsables des ODD et de l¡¯Agenda 2063 au sein de l¡¯UA, afin qu¡¯il n¡¯y ait pas de doublons. Nous discutons aussi avec l¡¯ONU.

Pour mesurer les progr¨¨s, il vous faut des donn¨¦es. Les statistiques des gouvernements ne sont pas forc¨¦ment disponibles. Comment faites-vous ?

Nous avons nos propres donn¨¦es, mais nous ne savons pas toujours les g¨¦rer. Nous proc¨¦dons actuellement ¨¤ leur num¨¦risation sur une plateforme de donn¨¦es concernant la gouvernance en Afrique ¨¤ laquelle seront connect¨¦s tous nos bureaux nationaux afin d¡¯¨¦tablir un guichet unique avec des mises ¨¤ jour et une utilisation strat¨¦gique des donn¨¦es. Lorsque nous ¨¦valuons un pays, l¡¯une des difficult¨¦s tient aux donn¨¦es ¨¤ caract¨¨re politique, comme le taux de ch?mage. Les syndicats vous diront une chose, le gouvernement une autre, et le secteur priv¨¦ aura encore une autre version. Vous pouvez avoir trois s¨¦ries de chiffres pour la m¨ºme chose. Le MAEP dispose d¡¯un processus pour v¨¦rifier et valider les donn¨¦es, mais les participants, dont les gouvernements, doivent donner leur aval.

Comment le MAEP prend-il en compte les plus jeunes ?

Avec nos partenaires, nous organisons un ¨¦v¨¦nement pour les jeunes en Namibie. Il existe un bureau jeunesse dans notre d¨¦partement de la communication. Nous avons aussi des liens avec les Universit¨¦s. Un groupe de jeunes travaille avec nous ; nous accueillons aussi des stagiaires. J¡¯ai recrut¨¦ de nombreux jeunes qui font un excellent travail. Une chose que nous avons r¨¦ussi ¨¤ faire est le renforcement et le d¨¦veloppement des comp¨¦tences. Dans les prochains moins, des jeunes de l¡¯UA seront aupr¨¨s du MAEP. Nous esp¨¦rons qu¡¯ils participeront ¨¤ nos ¨¦valuations.

Vos rapports abordent-ils les probl¨¨mes qu¡¯affrontent les jeunes ?

Au niveau national, oui ! Si un pays ne fait pas assez pour r¨¦pondre aux difficult¨¦s des jeunes, nous lui ferons des recommandations. C¡¯est l¡¯une des questions transversales abord¨¦es dans les rapports.

Qu¡¯en est-il de l¡¯¨¦galit¨¦ femmes-hommes et de la promotion des femmes ?

C¡¯est aussi une question transversale. Le contexte socio-¨¦conomique n¡¯est pas notre seul angle d¡¯approche concernant la question des femmes ; la sph¨¨re politique est ¨¦galement abord¨¦e. Si nous estimons qu¡¯un pays n¡¯a pas assez de femmes dans des fonctions politiques, notamment au Parlement, nous le signalons. L¡¯UA a fix¨¦ des objectifs et si un pays ne fait pas assez pour les atteindre, nous le soulignons aussi. Certains pays prennent ensuite des mesures pour donner aux femmes un acc¨¨s ¨¤ des postes de pouvoir.

Quel est votre message pour les pays africains ?

La bonne gouvernance est la solution aux probl¨¨mes du continent africain. Les d¨¦fis en mati¨¨re de paix et de s¨¦curit¨¦ traduisent surtout des probl¨¨mes de gouvernance, tels la gestion des ¨¦lections. M¨ºme les probl¨¨mes li¨¦s au terrorisme, ¨¤ la gestion de la diversit¨¦, au d¨¦veloppement ont trait ¨¤ la gouvernance. En Afrique, la bonne gouvernance facilite tout, sinon il y a des blocages. C¡¯est la cl¨¦ ! La gouvernance judicieuse permettra ¨¤ l¡¯Afrique d¡¯¨ºtre reine du si¨¨cle.? ? ?