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La ¡®Petite Afrique¡¯ perd de son attrait

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La ¡®Petite Afrique¡¯ perd de son attrait

Commer?ants et courtiers d¨¦prim¨¦s dans une cit¨¦ nagu¨¨re affair¨¦e
Franck Kuwonu
Afrique Renouveau: 
 Traders from Africa buying goods in Xiaobei, China. Photo: Gwenn Dubourthoumieu
Photo: Gwenn Dubourthoumieu
Des commer?ants africains ¨¤ la recherche d¡¯une bonne affaire ¨¤ Xiaobei. Photo: G. Dubourthoumieu

Dans la chaleur ¨¦touffante d¡¯une apr¨¨s-midi tropicale ¨¤ Guangzhou, une ville au sud-est de la Chine, un groupe d¡¯Africains d¡¯?ge-moyen ¨¤ l¡¯aff?t de clients potentiels ¨¦tait en vadrouille ¨¤ l¡¯entr¨¦e d¡¯une rue bord¨¦e de boutiques tandis qu¡¯un autre groupe de trois femmes et un homme ber?ant un enfant dans ses bras attendaient aupr¨¨s de leurs ballots de marchandises dans une rue adjacente.

? Bienvenue au Oversea Trading Mall ?, indiquait l¡¯enseigne lumineuse du b?timent de hauteur moyenne, au milieu de nombreuses affiches publicitaires, surplombant les lieux.

Nous sommes ¨¤ Xiaobei, ¨¦galement surnomm¨¦e ? Petite Afrique ?, dans le quartier central de Guangzhou, une m¨¦galopole chinoise, o¨´ l¡¯Oversea Trading Mall, un centre commercial, a longtemps ¨¦t¨¦ la destination pr¨¦f¨¦r¨¦e de milliers de commer?ants d¡¯Afrique subsaharienne en qu¨ºte de bonnes affaires.

Guangzhou est une m¨¦galopole de 13 millions d¡¯habitants.

Ayant tra?n¨¦ leurs ballots aux bords de la rue, le groupe des quatre tenta en vain, probablement en raison d¡¯une barri¨¨re linguistique, de n¨¦gocier le prix d¡¯une course en taxi. Il eut fallu l¡¯entregent d¡¯un des vadrouilleurs pour trouver un accord.

? C¡¯est ¨¤ cela que nous occupons notre temps ?, Magloire, un immigrant de C?te d¡¯Ivoire qui h¨¦sita ¨¤ s¡¯identifier davantage expliqua ¨¤ Afrique Renouveau. ? Nous aidons nos fr¨¨res et s?urs pour leurs besoins professionnels ?.

A l¡¯instar de Magloire, des centaines d¡¯Africains vivant ¨¤ Xiaobei ¨¤ Guangzhou se consid¨¨rent ? courtiers ?.

Capitale du Guangdong, la province la plus riche de Chine et moteur ¨¦conomique du pays, Guangzhou est r¨¦put¨¦ pour ses nombreux march¨¦s de gros et sa foire commerciale internationale annuelle.

Dans les stations de m¨¦tro de Xiaobei, dans ses rues et passerelles pi¨¦tonnes orn¨¦es de bougainvilliers le long de la route principale, on entend parler arabe, bambara, fran?ais, portugais, lingala, malgache, yoruba ou igbo ¡ª? preuves de la diversit¨¦ culturelle de la communaut¨¦ de migrants.

Il y a trois ans environ, les affaires battaient encore leur plein ¨¤ Xiaobei, en raison de l¡¯afflux r¨¦guliers de grossistes africains. Selon les donn¨¦es officielles chinoises, 430 000 personnes originaires d¡¯Afrique subsaharienne ont, par exemple, franchi, par les postes de contr?les de la ville au cours des neuf premiers mois de 2014.

? L¡¯essor des liens sino-africains incite les Africains ¨¤ poursuivre leurs r¨ºves ¨¤ Guangzhou ?, titrait Radio chine internationale en 2015, r¨¦sumant ainsi les mouvements croissants de population et de marchandises entre la m¨¦tropole m¨¦ridionale et plusieurs pays d¡¯Afrique.

En ces temps, les m¨¦dias locaux soulignaient encore le succ¨¨s ¨¦conomique de certains des migrants. Une enqu¨ºte rapide aupr¨¨s des habitants de la Petite Afrique a r¨¦v¨¦l¨¦ que 2 migrants sur 10 gagnaient plus de 30 000 yuans (4 800 dollars ¨¤ l¡¯¨¦poque) par mois, soit plus que le revenu mensuel moyen des travailleurs chinois locaux. Les autres gagnent moins, environ le salaire moyen d¡¯un travailleur chinois local.

En 2016, la ? Petite Afrique ? perd son lustre : la ? baisse des prix des mati¨¨res premi¨¨res touche la Petite Afrique de Chine ?, d¨¦clarait le Financial Times en juillet de cette ann¨¦e.

Baisse des ¨¦changes

Apr¨¨s avoir atteint 215,91 milliards de dollars en 2014, le volume des ¨¦changes commerciaux entre la Chine et l¡¯Afrique fut r¨¦duit ¨¤ 127,97 milliards de dollars en 2016. La tendance s¡¯inversa en 2017, le montant total augmentant de 14,1 % par rapport ¨¤ l¡¯ann¨¦e pr¨¦c¨¦dente. N¨¦anmoins, le niveau resta inf¨¦rieur au pic atteint en 2014.

Migrants et locaux p?tissent de l¡¯effondrement des ¨¦changes ayant entra?n¨¦ un recul de l¡¯afflux de commer?ants africains.

Barry, un migrant guin¨¦en qui refuse de donner son nom complet, est ¨¦tudiant ¨¤ temps partiel. Revendeur d¡¯appareils ¨¦lectroniques et r¨¦parateur de smartphones, il t¨¦moigne du sentiment g¨¦n¨¦ral de ralentissement des affaires.

A midi, de nombreux magasins ¨¦taient rest¨¦s ferm¨¦s. Ailleurs, les clients se faisaient attendre dans ceux qui ¨¦taient ouverts.

Seule au milieu de ses ¨¦talages de perruques, de tissages et d¡¯extensions de cheveux, une commer?ante attend des clients africains qui tardaient ¨¤ arriver en masse.

Barry, Magloire et les autres migrants imputent le d¨¦clin ambiant au marasme ¨¦conomique en Angola, au Nig¨¦ria et en Zambie, ¨¤ la concurrence accrue des importateurs chinois install¨¦s en Afrique, aux restrictions de visas et ¨¤ la r¨¦pression polici¨¨re des sans-papiers.

? Les Angolais ne viennent plus ?, se lamente Amadou, un Malien, expliquant que les Angolais ¨¦taient le plus grand nombre. Ces derniers ayant r¨¦duit leurs visites en raison de la r¨¦cession ¨¦conomique qui a entra?n¨¦ une baisse de la demande de biens import¨¦s ; le nombre total de commer?ants saisonniers subsahariens a ainsi chut¨¦.

En Afrique

Dans les villes africaines, les consommateurs sont toujours ¨¤ la recherche de produits de bon march¨¦ estiment Amadou et Barry, m¨ºme si la demande reste affaiblie par le ralentissement, quoique temporaire, de la croissance ¨¦conomique, les commer?ants africains ne trouvent plus profitable de se rendre en Chine.

Le revers de fortune de la ? Petite Afrique ? est ¨¦galement d? au fait qu¡¯un nombre croissant d¡¯entrepreneurs chinois s¡¯¨¦tablissent en Afrique, a rapport¨¦ le quotidien hongkongais South China Morning Post, en mai de cette ann¨¦e. Les commer?ants chinois bas¨¦s en Afrique b¨¦n¨¦ficient de faibles droits et de pr¨¦l¨¨vements ¨¤ l¡¯importation, ce qui leur permet d¡¯importer de Chine continentale des produits bon march¨¦.

Selon le South China Morning Post, le nombre de Chinois vivant au Ghana se situerait entre 20 000 et 30 000, soit plusieurs milliers de fois qu¡¯au milieu des ann¨¦es 1990. ? En dix ans ¨¤ peine, le flux des affaires entre l¡¯Afrique et la Chine continue de s¡¯inverser, car les entrepreneurs chinois rep¨¨rent davantage d¡¯opportunit¨¦s ¨¤ l¡¯¨¦tranger tandis que les Africains sont ¨¤ l¡¯¨¦troit en (Chine), ? a soulign¨¦ le journal.

Le nombre d¡¯Africains vivant ¨¤ Guangzhou avait une fois ¨¦t¨¦ estim¨¦ ¨¤ 100 000 par les m¨¦dias locaux. Puis, au plus fort de l¡¯¨¦pid¨¦mie d¡¯Ebola en 2014, les responsables locaux ainsi que les m¨¦dias ont port¨¦ le chiffre ¨¤ un demi-million, g¨¦n¨¦rant ainsi des inqui¨¦tudes et emmenant les autorit¨¦s ¨¤ d¨¦mentir et ¨¤ donner un chiffre d¡¯environ 20 000.

Les migrants se plaignent r¨¦guli¨¨rement de l¡¯? agressivit¨¦ ? des contr?les policiers ¨C une autre raison du d¨¦clin de la population de la ? Petite Afrique ?.

Si un visa d¡¯entr¨¦e est relativement facile ¨¤ obtenir, le renouveler est si difficile que de nombreux migrants deviennent clandestins. Ceux dont les visas ont expir¨¦ sont passibles de lourdes amendes et d¡¯une peine d¡¯emprisonnement, en cas de d¨¦faut de payement.

Ceux qui s¡¯inscrivent aux ¨¦tudes ont le droit de rester dans le pays. ? Certains migrants s¡¯inscrivent ¨¤ l¡¯¨¦cole tout en faisant des petits boulots ¨¤ c?t¨¦ ?, confie Komlan Semanu, un diplomate ouest-africain ¨¤ Afrique Renouveau.

Barry, le r¨¦parateur ¨¦lectronique et ¨¦tudiant ¨¤ temps partiel en est un exemple. ? Je me rendrai aux cours plus tard dans l¡¯apr¨¨s-midi ?, dit-il ¨¤ Afrique Renouveau.

Aussi, pendant qu¡¯un nombre croissant d¡¯entrepreneurs chinois exportent directement vers les march¨¦s locaux africains, se r¨¦servant ainsi une grosse part des ¨¦changes commerciaux informels et que les autorit¨¦s restent fermes sur l¡¯immigration, Magloire et les autres s¡¯interrogent sur leur avenir.

Certains sont pr¨ºts ¨¤ braver la crise tandis que d¡¯autres iront probablement ailleurs en qu¨ºte de meilleurs p?turages.

Nombre d¡¯entre eux pensent ¨¤ Yiwu, une ville situ¨¦e ¨¤ deux heures de train de Shanghai. Surnomm¨¦e la capitale mondiale des produits de base, Yiwu est r¨¦put¨¦e, plus hospitali¨¨re que Guangzhou, parce qu¡¯elle ne serait pas soumise ¨¤ des contr?les policiers intempestifs.

Ceci dit, le ralentissement ¨¦conomique en Afrique subsaharienne, le nombre croissant de commer?ants chinois install¨¦s sur le continent et les contr?les rigoureux ¨¤ l¡¯immigration ¨¤ Guangzhou font que pour les Africains en Chine, la ? Petite Afrique ? a perdu son attrait.? ?